Halte à l’exode précoce des enfants d’Afrique !

2 août 2014

Halte à l’exode précoce des enfants d’Afrique !

Fatoumata Mariko est une jeune malienne engagée dans le Mouvement Africain des Enfants et Jeunes Travailleurs (MAEJT) depuis 2009.
Fatoumata Mariko, une jeune Malienne
active du  (MAEJT)   Crédit Photo : C. Ligan

Engagée dans le Mouvement africain des enfants et jeunes travailleurs (MAEJT) depuis 2009, Fatoumata Mariko a représenté l’Association nationale des enfants et jeunes travailleurs du Mali lors d’un atelier de lancement d’études sur la protection des enfants mobiles d’Afrique précédé d’une réunion avec la Cédéao à Dakar du 14 au 16 juillet 2014. Rencontrée au bureau de l’Unicef, elle s’est pr̂etée aux questions de Charles Ligan. Pour elle, l’avenir des enfants d’Afrique est certain si l’éducation et leur participation à la prise de décision sont garanties au niveau national et continental.

Comment êtes-vous devenue membre de l’organisation des enfants d’Afrique ?

Ma mère est restauratrice et, au retour de l’école, je l’aidais dans ses tâches. Les enfants et jeunes travailleurs de l’association , EJT, venaient manger chez elle; je m’intéressais aux documents qu’ils apportaient, je les lisais sans rien comprendre jusqu’au moment où ils m’ont expliqué le contenu des documents de capitalisation. J’ai alors compris comment les enfants s’organisent pour prendre des décisions ou pour faire des activités. Plus tard, j’ai eu ma première formation sur la photographie grâce à l’Unicef; j’ai appris beaucoup de choses sur l’Association des enfants et jeunes travailleurs, puis j’ai intégré le cours d’alphabétisation qui m’a permis d’évoluer jusqu’à obtenir le diplôme d’études fondamentales et aujourd’hui je suis au lycée.

Quelle est la situation des enfants travailleurs et migrants au Mali aujourd’hui ?

Ces enfants sont confrontés à beaucoup de problèmes surtout avec la crise. Il y a beaucoup de déplacements d’enfants du nord vers le sud; on essaie de les tranquilliser, de leur expliquer qu’ils sont aussi en famille au sud où ils ont trouvé refuge. Avec la collaboration de NDA, on leur offre de la nourriture. Il y a aussi beaucoup d’enfants qui viennent du Burkina-Faso et de la Côte d’Ivoire; grâce au partenariat avec les coordinations de leurs pays d’origine, on essaie de suivre leur parcours depuis le départ jusqu’à destination. Ils sont protégés et pris en charge pour leurs activités. En fait, le Mouvement des enfants et jeunes travailleurs est installé dans 26 pays, donc nous suivons le parcours des enfants et leur garantissons une protection en cours de route comme à l’arrivée.

Quelle est la contribution de votre mouvement dans la protection des enfants contre les pires formes du travail et les risques liés à la mobilité?

Effectivement, les EJT qui sont dans les zones frontalières sont confrontés à des problèmes de mobilité, notre association agit directement sur le terrain avec l’appui des autorités et de nos partenaires. Les membres de notre association se déplacent beaucoup sur le terrain pour régler les problèmes des enfants migrants.

Est-ce qu’on peut considérer aujourd’hui que Fatoumata est une transfuge réussie de la situation malheureuse d’enfants en Afrique?

Quand on observe de près, on constate que la participation des enfants est un aspect important. Quand les enfants participent, cela permet d’améliorer les prises de décision. Le statut d’observateur auprès de l’Union africaine a été obtenu au prix de longs combats. Donc le combat du MAEJT est une réussite parce que nous sommes représentés dans les instances de prise de décision en Afrique.

Quels sont les avantages pour les enfants de participer directement à la prise de décisions qui les concernent directement?

C’est plus facile pour un enfant d’échanger avec son camarade qu’avec un adulte. Le système de formation par les pairs institué au sein de notre organisation joue un grand rôle dans le développement de l’Afrique. L’Afrique a, en fait, besoin aujourd’hui des enfants qui participent à leur propre développement, à la préparation de leur avenir.

Quel a été ton message aux responsables de la Cédéao lors de votre réunion ?

Avec la Cédéao (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) nous sommes membres d’une plateforme régionale pour la lutte contre l’exode précoce des enfants et pour prévenir les risques liés à la mobilité des enfants. Le message clé que nous leur avons adressé c’est d’accorder une place à la participation des enfants aux prises de décision au sein de nos Etats en Afrique. Il y a des responsables politiques qui ne comprennent pas encore le travail fait par le Mouvement des enfants et jeunes travailleurs. Nous avons donc  présenté un plaidoyer pour que les Etats prennent en compte l’avis des institutions d’enfants lors des réunions gouvernementales notamment sur les questions liées aux enfants en vue de décisions utiles pour leur avenir.

Le grand problème de l’Afrique, c’est l’éducation des enfants. Nous avons demandé des améliorations des classes d’alphabétisation, des équipements, des appuis matériels, financiers et techniques. Car l’éducation donnée dans les classes d’alphabétisation est de qualité; la preuve, les enfants qu’on a présentés aux examens ont réussi. Les cours d’alphabétisation qu’ils reçoivent sont au même niveau que les cours donnés à l’école formelle. Il y a donc nécessité de renforcer les cours d’alphabétisation au profit des enfants et jeunes travailleurs.

Par rapport à la mobilité des enfants, quels sont les souhaits que vous avez exprimés ?

On a remarqué que lorsque les enfants se déplacent, c’est les rapatriements qui s’en suivent souvent. Au niveau des pays, la question de la mobilité n’est donc pas prise positivement. Or, il y a des mobilités d’enfants qui sont positives. C’est pourquoi nous estimons qu’avant de prendre une décision concernant l’enfant, il convient d’examiner d’abord son problème. Alors qu’on se rendait à Dakar, une de nos amies venant du Cameroun a été rapatriée dès son arrivée au Bénin. Sans chercher à comprendre, on l’a amenée directement sur la piste. Il faut donc mettre les gens au même niveau d’information afin d’éviter de pareils traitements.

Un mot à l’endroit des autres enfants en situation de mobilité?

Quand on est en mobilité, il faut se faire des parents, s’autoprotéger avant l’apport des autres acteurs; il faut surtout se rapprocher des structures existantes pour des dispositions à prendre et pour la prise en charge.

Comment voyez-vous l’avenir des enfants en Afrique ?

Dans le millénaire à venir, les enfants seront acteurs de leur situation. Le développement d’un pays commence par l’éducation et avec les efforts du MAEJT et des partenaires, je vois venir l’image d’une nouvelle Afrique.

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